lundi 24 février 2014

Un prince à New York

J'en ai eues et j'en ai braillées des histoires qui foirent, mais je me console toujours en me disant que c'est dans le fumier que poussent les plus belles fleurs : la preuve, les gars infidèles achètent les plus beaux bouquets.

Tiens, je vous cueille une des fleurs issues de mon fumier amoureux parce qu'à défaut de trouver mon prince charmant, j'ai tout de même eu ma part d'histoires dignes des contes de fées.

***
C'était bien avant 9/11, dans le temps où aller à New York et passer les douanes n'était pas aussi compliqué que faire ses impôts et où 101 ml de liquide n'était pas une menace à la nation. Nouvellement mono-parentale, j'ai décidé de m'incrire à une formation au American Comedy Institute of New York, parce que j'avais besoin de me changer les idées, de rire, de voyager, j'avais besoin de vivre.

Cassée comme un clou, j'ai booké une chambre dans un Bed & Breakfast louche tenu par une québécoise. C'était très abordable parce que c'était aussi pas mal tout croche et en plein milieu de Harlem, un quartier aussi rassurant qu'un homme qui te demande ce que tu manges pour être belle de même à 4 heures du matin dans une ruelle. Mais j'avais 26 ans, j'étais blonde, j'étais hot, j'étais invincible.



Après mon premier cours de comique, je me suis cherché une place pour m'installer avec un café, un calepin, des idées et un crayon. Je ne savais pas trop où aller, c'est beau New York mais c'est aussi un peu over the top quand tu cherches juste un petit café ordinaire et que tout ce que tu trouves c'est le Naked Cowboy pis des billets pour Cats. J'ai abordé un policier pour lui demander conseil. Il m'a fait un grand sourire, a regardé sa montre et m'a dit " Tu sais quoi? C'est le temps de ma pause, non seulement je vais te recommander un café mais je vais aller en prendre un avec toi!" et c'est comme  ça que je me suis ramassée dans un café New Yorkais à jaser avec un beau policier en uniforme. Je trouvais que le voyage commençait bien. Quand il a dû retourner travailler, il m'a donné rendez-vous dans un petit resto dans Time Square pas loin, il voulait m'inviter à souper to get to know me more. Ou la la, la magie de New York opérait et j'adorais ça.

Je me suis pointée au resto-bar à 18h. Il n'était pas là, je me suis donc installée pour commander un verre et je me suis mise à noicir mon cahier d'idées. À 18h30, j'ai commencé à me dire que je m'étais peut-être fait poser un lapin américain. La différence avec un lapin québécois ? Y en a pas sauf que t'es aux États. J'étais seule et affamée dans un bar que je ne connaissais pas, j'étais venue à NY faire du stand up mais là j'étais stood up. Juste comme j'allais lever les pattes, le barman pose un verre devant moi, je lui dit que j'ai rien commandé, il me répond que ça vient de l'homme là-bas, au bout du comptoir. Je me retourne pour voir celui qui veut me faire boire, il m'envoie un petit Hello de la main, je fais un sourire un peu niais, j'articule un genre de Thank you, cheers et je continue de faire semblant que j'écris dans mon calepin. Y avait pas de Iphone dans ce temps là, donc pas grand chose pour nous distraire pendant qu'on attendait après quelqu'un ou même pendant qu'on était avec quelqu'un mais ça c'est un autre dossier.

Quelques minutes plus tard, l'homme au free drink se lève, passe derrière moi, s'arrête et me dit avec un accent tout droit sorti de Brooklyn "Hi, I am Johnny* je quitte pour le travail. Prends ce que tu veux, toute la soirée, je m'occupe de la facture, je travaille sur le show des Misérables, je vais revenir vers 23 heures, si tu veux qu'on fasse connaissance, attends moi, sinon je te souhaite une belle soirée". Il a dit au barman et à la serveuse "Take care of my friend here make sure she's neither hungry or lonely"  (prenez soin de mon amie, assurez-vous qu'elle ne meure ni de faim, ni d'ennui) et il est parti. Juste comme ça.

Là j'entend les filles qui demandent : ''Pis y'était comment? beau, grand, jeune et fringuant ?"
Honnêtement? Non, pas tellement.
Il avait presque 20 ans de plus que moi, il était de la même grandeur que moi (sans talons) et il avait l'accent typique de l'italien élevé à Brooklyn. Mais il avait aussi un charme fou, il était séduisant, très très drôle et c'était un véritable gentleman : le genre qui sait quand ouvrir les portes et se fermer la boîte. Et moi, si t'es drôle et que tu sais comment traiter une femme, tu deviens de plus en plus beau à mes yeux et tu te hisses dans mon estime sans même te hisser sur la pointe des pieds.

Alors, oui je l'ai attendu. J'ai discuté avec le barman pour apprendre qu'il était acteur de jour et il venait juste de tourner dans Sex and the city, j'ai discuté avec la serveuse, une jeune danseuse pleine de rêves et d'ambitions, et j'ai réalisé que la majorité du staff des bars de New York était constitué d'artistes, j'étais dans mon élément, j'étais comblée. Puis Johnny est revenu et on a parlé, parlé, parlé : de lui, de moi, de New York, du Québec, de la vie, une vraie discussion dans la grosse pomme digne d'un film de Woody Allen.
Quand il m'a demandé où je logeais et que j'ai répondu dans un B & B à Harlem, il m'a répondu : No you're not. Cinq minutes plus tard, on était dans un taxi, on allait chercher mes choses et il me prenait une chambre dans un hôtel en face du resto. Et NON, il n'a fait aucune allusion au fait de partager ma chambre ou mon lit, il a payé la chambre pour la semaine rubis sur l'ongle et m'a gentiment offert de me faire faire un tour de ville le lendemain. C'est toute la semaine que je l'ai laissé me guider à travers New York, le New York que seul le vrai new yorkais peut te faire découvrir. J'ai mangé le meilleur steak de ma vie (assise à côté de Gwyneth Paltrow), j'ai bu le meilleur café, j'ai visité les plus beaux endroits et tout ça toujours à ses frais parce qu'il m'a bien signifié qu'il était hors de question que je paye quoi que ce soit. En tout cas, cassé comme j'étais c'était plus hors de question qu'il pensait. OUI, j'ai fini par l'inviter à ma chambre, mais pas parce que je me sentais obligée ou redevable, j'étais tout simplement tombée amoureuse. Kessé vous voulez ? moi aussi ça m'arrive des fois de me prendre pour Pretty Woman. 

Quand j'ai dû retourner à Montréal j'avais la boîte à souvenirs ben pleine mais le coeur ben gros de devoir quitter mon prince de New York pour ne plus jamais le revoir, mais c'était mal le connaître. À peine deux semaines plus tard, il m'appelait et me disait "I can't take it anymore, I miss you too much, I am booking you a flight to New York". Pendant les six mois suivants, je descendais des 3, 4 ou 5 jours à New York en avion à ses frais et moi, je faisais ma fraîche. Ma vie était un film et pour une fois y' avait du budget.
Mais le conte de fées a pris fin quand la réalité m'a crié Présente ! ben fort un soir que je me préparais pour notre souper au resto. Je me coiffais en écoutant une toune et en dansant un peu. Johnny m'a dit "Peux tu baisser ta musique svp... si on peut appeler ça de la musique ! T'es comme mes filles, t'écoutes ça ben trop fort." Et là, je me suis rappelée qu'il y avait pas juste 8 heures d'autobus ou 1 h d'avion qui nous séparaient, y avait toute une génération ! Il y a des gens pour qui ça marche ce genre de relation intergénérationnelle, mais pour moi c'était plutôt une relation vélo stationnaire : ça n'allait nulle part.

Et cette fois-ci, quand j'ai quitté pour Montréal, j'ai dû le quitter lui aussi : je l'ai remercié, pour les moments magiques, pour les souvenirs, pour les sourires et pour l'Amour. Je lui ai promis que je ne l'oublierais jamais  et c'est vrai. On se parle encore aujourd'hui sur Facebook de temps en temps.

Je ne l'oublierai jamais parce que c'était une histoire incroyable, mais aussi parce que ça m'a permis de réaliser que pour moi y'a pas que l'apparence qui compte y'a aussi la personne : moi je tombe amoureuse de l'âme en dessous de l'étiquette. Oui, y en a eu du fumier qui a suivi mais je peux encore y croire grâce à lui. Croire à l'Amour, aux gentlemen, aux hommes qui essayent pas systématiquement de coucher avec la fille, aux vrais romantiques, aux gars qui n'ont pas besoin d'entrer dans le moule du prince charmant pour te faire sentir comme une princesse. Vaut mieux briser des moules que des coeurs, non ?

Bref, j'en eues de belles histoires et avec de la chance, la prochaine aura lieu dans ma ville. Ça fait qu'en attendant de trouver mon Prince à Montréal, je vais aller manger mes émotions au Roi de la Patate, on a la royauté qu'on peut.

* Ben non c'est pas son vrai nom, me prenez vous pour une cruche ? Son vrai nom, c'est Tony.

13 commentaires:

  1. C'est une belle histoire un peu sortie d'un compte de fée, du moins certainement pour bien des femmes. J'en vois déjà plusieurs te dire que tu es folle d'avoir abandonné cela. Et toi ne regrettes-tu pas un peu aujourd'hui?

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    1. J'avoue que moi même je me lirais et me demanderais à quel point c'est exagéré mais c'est réellement exactement comme ça que ça s'est passéS

      Si je regrette? Zéro. Faut savoir vivre les moments présents mais aussi savoir les laisser devenir du passé. On avait clairement une attirance muteulle et de merveilleux moments à passer mais aucun avenir ensemble, moi avec mon enfant à Mtl, lui sa carrière à New York ,et les amours déchirantes, très peu pour oi. J'aime mieux être moins gâtée de cadeaux et plus par une présence que le contraire :)

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    2. J'en conclus donc qu'une vie à deux à New York incluant ton enfant n'était pas envisageable.

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    3. Ben non, il a un papa et celui-ci est à Montréal et donc, y'avait même pas à y réfléchir pour moi.

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  2. C'est peut-être simplement ton style d'écriture mais il ne semble pas avoir fait grand chose à part te payer un luxe que tu ne pouvais pas t'offrir. Mais bon faut croire que dans ce monde matérialiste il y à des gens que ça allume.

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  3. Salut Richard! Je suis désolée que ce soit ainsi que tu l'aies interprété. Je croyais que mon texte rendait bien à quel point cet homme là m'a fait rire, m'a fait découvrir une ville et la vie, à quel point les petits cadeaux matériels n'étaient que la pointe de l'iceberg de ce qu'il m'a offert. S'il y a quelqu'un qui n'est pas matérialiste c'est bien moi, j'ai d'ailleurs plus souvent qu'autrement fréquenté des gars avec qui c'est MOI qui payait la note comme je l'ai expliqué dans mon billet
    " Le pâme shop". Mais bon, chacun a droit à son opinion. :)

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    1. Je ne peux pas dire que, ces émotions qu'il t'a fait vivre, ne se voyait pas aux travers du texte, au contraire, mais aux travers de tout ce qu'il t'a payé il y à dequoi se poser des questions sur ce que ça prend à une femme pour être heureuse. Cela dit ce n'est pas pour te juger que je fait cette remarque. C'est peut-être plus parce que je suis désabusé du modèle de la femme qui à besoin qu'on lui paie 5 ou 6 mille affaires tout le temps pour être heureuse. Personellement je m'en paye pas de resto (ou si quand je suis foutrement lâche ou saoul mais comme c'est pas à chaque semaine...), des voyages, des spectacles, etc. parce que je trouve que c'est une perte de temps de travailler à faire de l'argent alors aussi bien ne pas en avoir besoin mais je crois aussi que je serais franchement malheureux avec une femme qui consent à tout me payer pour pouvoir profiter de ces luxes. Disons que les femmes qui refusent de se laisser entrainé dans les fêtes commerciales, dans les envies de luxe etc. ça ne court pas les rues.

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  4. Salut Richard,
    Personnellement je dirais que le proverbe "Qui se ressemble s'assemble" pourrait peut être t'aider dans ta quête.

    En effet si on n'aime pas comme dans ton cas :
    - voyager,
    - goûter à de nouvelles saveurs qui ne serait pas évidentes à faire dans sa propre cuisine.. en allant au resto,
    - Aller voir des spectacles de musique, de danse, de théâtre question tout simplement de ressentir des émotions différentes, de voir de gens qui viennent d'ici ou d'ailleurs dans un environnement qui n'est pas le sien...
    et bien tant mieux du moment que tu es heureux.
    Par contre, il te faut tout simplement chercher une femme qui partage les mêmes valeurs et envies que soi et qui en est heureuse ainsi ... tout comme tu sembles l'être (?).

    De ce fait, je ne suis pas d'accord de mettre tout le monde dans le même panier et de dire que celles et ceux qui apprécient les choses mentionnées plus haut, femmes comme hommes ont toutes/tous des envies de luxe comme tu dis.
    La plupart de ces activités peuvent être GRATUITES à Montréal. Un bel exemple d'action communautaire est le Patro (http://www.patroleprevost.qc.ca/le-patro/mission).

    Donc oui, il y a probablement peu de gens, hommes comme femmes qui n'apprécient aucune des activités mentionnées plus haut MAIS c'est comme tout, en cherchant bien, on finit par trouver. Du coup, trouver une femme (ou un homme) qui n'aime ni voyayer, ni aller au resto, ni aller voir des spectacles quelqu'ils soient, payants ou GRATIS, ça devrait pouvoir se faire puisque tu en es un bel exemple.

    Dans tous les cas, je me dis que ce n'est qu'en se mettant à la place d'autrui qu'on peut comprendre certaines choses... et surtout que c'est avant tout en étant heureux soi-même EN SOLO que l'on finit par trouver chaussure à son pied.

    Bonne quête à toi...

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  5. Oh yes. Une belle histoire avant de me coucher! Jen ai vécu aussi, je vais me les rappeler. Pis du rêves et vivre au moment présent, merci de me dire que je peux y croire.
    Merci aussi Richard, qui m'a fait encore plus sourire avec ses commentaires sans profondeurs. As tu bien lu dude? Parles tu aux gens toi? Parce que quand tu accompagnes quelqu'un dans des soirées ou au supermarché, on se parle, on apprend à ce connaître et la l'expérience à une profondeur, un souvenir plus palpable.

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  6. Le commentaire de Richard me fait penser à celui ou celle qui lui manque quelque chose et est alors frustré que cela l'empêche de trouver l'âme soeur. Le gros en veux à ceux qui recherche les minces. Le petit en veux à ceux qui recherche les grands, le pauvre en veux à ceux qui recherche les riches, etc. Comme disait ma mère à chaque torchon sa guenille. On ne peut être différent de ce qu'on est et offrir ce qu'on n'a pas. Il est donc primordial d'être authentique et cela va attirer la personne à qui sa convient. Des fois ça peut être long mais c'est la seule façon d'avoir une chance de réussite, et surtout de ne pas perdre son temps.

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  7. Semblerait que je sois incompris. J'évoque des questionnements et des impressions que le texte ma donné. Oui j'ai l'impression qu'il y a généralement (oui oui je suis pas fou et je sais que ça ne peux pas s'appliquer à 100% des femmes) de très grandes attentes de la part de la gente féminine en ce qui concerne les sorties, mais bon ça ne peux pas être un reproche on vit toujours dans le berceau de l'american dream à ce que je sache, société ou le capitalisme est un bien sacré à ne pas dénigrer. Non je ne suis pas amer, oui je suis heureux. Je ne pense pas manquer de quoi que ce soit, à la limite je trouve que ma situation d'être humain dans la classe moyenne comme étant trop confortable et je cherche à me simplifier la vie en me la compliquant (j'aime ce paradoxe que peu comprennent). Mais bon je n'ai pas de quête, je comprend d'aillerus pas le désir de se mettre en couple. Un jour je croiserai quelqu'un avec qui j'aurai envie de faire un boute et cela se déroulera comme ça se déroulera, aucune attente.

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    1. Cette réplique est différente de la précédente. Comme tu dis il est important de se mettre en couple avec une personne qui nous convient. Plusieurs se mettent en couple simplement pour ne pas être seules. Ce n'est pas une très bonne idée à mon avis.

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  8. Salut Anne-Marie! En fait, je crois un peu comprendre que tu aies cédé à ce genre de passion... Ce que j'aime d'un homme, c'est qu'il me sorte de mon quotidien teinté d'ergomanie (workhoolic) en rivalisant d'imagination et d'audace de toutes les manières possibles. J'adore qu'il me fasse décrocher, peu importe la façon dont il s'y prend, pourvu qu'elle soit originale... Je crois moi aussi que cette fabuleuse aptitude qu'ont certains hommes d'allumer des étoiles dans les yeux des femmes dépend d'autre chose que de leur situation financière. Et que celle-ci n'est effectivement qu'accessoire dans l'histoire. J'aime "me sentir ailleurs" quand je suis avec un homme... personnellement, je jette toujours un zeste de folie à tout ce que je fais : je chante sur mon lieu de travail, j'écris, je dessine, je disjoncte, je blague... bref je m'amuse le plus souvent possible. Je m'ennuie mille fois plus avec un homme plate qu'avec un homme fauché. Et, un peu comme toi, sans aucun doute, ça m'est pas mal égal que le type puisse me payer de petits luxes s'il le fait sans folie dans le regard. J'aime davantage l'authenticité, le sens de l'humour et le zeste de folie qu'un portefeuille Guess bien garni ;-) J'aurais craqué moi aussi, comme toi... et le fait que le type ait payé pour moi n'aurait pas beaucoup influencé dans le fait que je montre des signes d'attachement... au risque de contredire l'opinion de Richard! ;-)

    Gen

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